« Edmond Ganglion & fils » de Joël Egloff

Je relis avec gourmandise le roman de Joël Egloff – son premier ; il vient d’être adapté au cinéma sous le titre GRAND FROID. Avant d’aller voir le film, je savoure à nouveau ce petit concentré d’humour noir. L’action peut sembler bien mince  : à Saint-Jean, petit village  dépeuplé, où on ne meurt plus, Edmond Ganglion voit son commerce de pompes funèbres partir à la dérive. C’est l’ennui, l’attente pour le croque-mort et ses deux employés – il a dû licencier les autres. Alors, en attendant un éventuel client, Ganglion boit de la prune maison, seule boisson proposée au « Café du Soleil », Georges astique chaque jour les plaques de marbre de la vitrine et Molo reçoit des petites  vieilles qui ont trouvé mieux que leur médecin pour les rassurer sur leur état de santé. Enfin, un jour, un défunt tombe du ciel. Un peu d’activité s’annonce : la toilette du mort un peu trop raide, la  veillée dans un gymnase qui sert de funérarium, la « petite messe froide et humide » où quelques villageois viennent par ennui ou curiosité ou « pour que, le jour venu, on leur rende la politesse », quelques détails techniques un peu embarrassants à résoudre… Mais le déroulement des obsèques va se compliquer un peu : il faut rejoindre le petit cimetière, éloigné de Saint-Jean ; les ennuis commencent pour le convoi – le corbillard et la voiture contenant l’oncle et la tante du défunt, le curé et le bedeau. L’inhumation aura-t-elle lieu?

Roman mortifère? Road-movie ? Il est un fait qu’on suit Georges, le vieux fossoyeur, et Molo, le jeune inexpérimenté et ahuri, dans un voyage où rien ne se passe comme prévu. Obstacles, incidents s’enchaînent mais n’empêchent pas Molo de se poser quelques questions existentielles ; Georges, plus pragmatique, se demande si cette nuit  ne va pas « effacer toute une vie d’un professionnalisme exemplaire ». Le lecteur ne peut rester froid  à la lecture de ce roman ; s’il ne s’esclaffe du moins rira t-il jaune !

Cécile